
Réparation intégrale du dommage : le juge apprécie souverainement le choix du barème de capitalisation
09/19/2019
Enlèvement international d’enfant : non-retour et conditions de mise en œuvre de l’article 13 de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980
09/20/2019Il est un principe en droit français et en droit européen qui veut qu’une mesure d’expertise soit soumise au principe du contradictoire. L’expert doit en effet se conformer aux principes directeurs du procès, parmi lesquels le principe du contradictoire apparaît comme l’un des plus importants.
On en trouve notamment l’illustration dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme (Voir notamment CEDH, 18 mars 1997, n° 21497/93, Mantovanelli c/ France, Rec. CEDH 1997, p. 424).
En France, la Cour de cassation a développé une jurisprudence emprunte de souplesse, consistant à sauver des rapports d’expertise qui n’ont pas toujours satisfaits, lors de leur élaboration, au principe du contradictoire.
En matière d’expertise, l’exigence du contradictoire résulte notamment de l’obligation de convocation des parties qui incombe à l’expert (Art. 160 CPC) et du droit qui leur est accordé de formuler des observations au cours de l’expertise (Art. 162 CPC). A défaut, le rapport produit peut être déclaré nul (Voir notamment Cass. Ch. Mixte, 28 septembre 2012, n° 11-11.381), comme le prévoit l’article 175 du Code de procédure civile.
Toutefois, selon la Cour de cassation, la méconnaissance du principe du contradictoire au cours de l’élaboration du rapport d’expertise peut être « régularisée » au stade de l’exploitation dudit rapport, si les parties ont été en mesure d’en discuter contradictoirement les termes au cours de l’instance (Voir not. Cass. Com., 10 décembre 2013, n° 12-20.252).
Cette solution s’applique qu’il s’agisse d’une expertise extrajudiciaire (Voir notamment Cass. Civ. 1re, 24 septembre 2002, n° 01-10.739) ou d’une expertise judiciaire (Voir notamment Cass. Civ. 2e, 8 juin 2017, n° 16-19.832).
Ces expertises ne doivent toutefois pas constituer les seuls éléments de preuve utilisés par le juge. Autrement dit, l’expertise réalisée non contradictoirement doit être corroborée par « d’autres éléments de preuve » pour être exploitée par le juge (En matière d’expertises extrajudiciaires, voir notamment Cass. Civ. 3e, 3 février 2010, n° 09-10.631. En matière d’expertises judiciaires, voir notamment Cass. Civ. 1re, 11 juillet 2018, n° 17-14.441 et 17-19581).
Dans un arrêt du 15 novembre 2018, la Cour de cassation a précisé ce que l’on entendait par « autres éléments de preuve ». Il y avait dans cette affaire deux types d’expertise : une expertise officieuse et une expertise judiciaire qui avaient pour point commun de ne pas avoir été élaborées de façon contradictoire. Les deux expertises ont été simultanément utilisées par l’une des parties.
La Cour a considéré que ces deux expertises se corroboraient mutuellement, de sorte qu’elles pouvaient donc être exploitées par le juge. Certes, ce qui compte, ce ne sont pas tant les conditions d’élaboration de la mesure d’instruction que la possibilité que les parties ont eu d’en discuter utilement et contradictoirement les conclusions au cours de la procédure. Néanmoins, avec cet arrêt du 15 novembre 2018, on peut légitimement se demander ce qu’il reste du principe du contradictoire et jusqu’où la Cour de cassation va aller pour régulariser des rapports qui ont été élaborés en violation de ce principe fondateur.